NEUROSCIENCES : Guérir par la pensée : une médecine qui pose question

En démontrant sa valeur thérapeutique, la "médecine par l'esprit" a cessé d'être une médecine "alternative". Mais en pratique, qui peut y recourir ? Existe-t-il des risques ? Le point en huit questions clés.

L'esprit peut-il tout guérir ?
Non. Soyons clairs, un cancer au stade terminal ne pourra être guéri ni par des séances de méditation, ni par le plus puissant des effets placebo. En revanche, l'un comme l'autre peuvent compléter, voire augmenter les effets d'un traitement.

En 2001, Fabrizio Benedetti et son équipe de l'université de Turin montraient ainsi que l'effet placebo peut être utilisé pour réduire les doses médicamenteuses.

Dans leur étude, des sujets souffrant de douleurs postopératoires étaient placés sous perfusion et recevaient sur demande un antalgique.

La moitié d'entre eux savait que la perfusion ne contenait qu'une solution saline sans aucune substance active ; l'autre moitié était persuadée que cette solution complétait les effets de l'antalgique. Résultat : ce deuxième groupe a réclamé 33 % moins d'antalgiques !

Si l'esprit ne peut pas tout soigner, ses effets s'exercent sur nombre de pathologies. Le neurofeedback réduit les crises d'épilepsie et traite efficacement les déficits de l'attention, des pathologies exclusivement mentales. Le procédé apparaît également prometteur pour soigner les troubles anxieux, notamment le stress post-traumatique.

Les effets de la méditation sont plus larges : on sait avec certitude qu'elle réduit la douleur, évite les rechutes dépressives et améliore l'attention. En atténuant le stress, elle aurait aussi de multiples effets indirects : elle boosterait le système immunitaire et réduirait l'inflammation, le vieillissement cellulaire, les risques cardiovasculaires, etc.

Quant à l'effet placebo, il peut accompagner toute prise en charge thérapeutique chez les patients qui y sont sensibles. S'il a surtout montré son efficacité contre la douleur et la maladie de Parkinson, il agirait quelle que soit la pathologie, en incitant l'organisme à fabriquer ses propres médicaments. " Le corps humain est capable de synthétiser toutes les molécules : antidépresseurs, anticancéreux, morphine, anti-inflammatoires, etc. , s'enthousiasme le psychiatre Patrick Lemoine, l'un des rares spécialistes français de l'effet placebo.

Le seul problème est que l'on n'a pas encore compris dans quelles circonstances l'effet placebo se met en place. "
Avons-nous tous la même capacité à nous soigner par la force de l'esprit ?
Oui, à condition de savoir exercer ce contrôle de l'esprit. Apprendre à maîtriser une région de son cerveau, voire une petite population de neurones, n'est qu'une question de temps. Ainsi, à raison d'une quarantaine de séances d'une demi-heure de neurofeedback, chacun peut améliorer ses capacités de concentration, cet entraînement modifiant la structure même de l'encéphale.

N'importe qui peut par ailleurs bénéficier des bienfaits de la méditation, moyennant une pratique quotidienne assidue. D'autant qu'elle a l'avantage de ne nécessiter aucun appareillage. En 2012, Gaëlle Desbordes, neurobiologiste au Centre Martinos d'imagerie biomédicale (Etats-Unis), montrait qu'après huit semaines de séances, l'activité de l'amygdale, une petite région du cerveau impliquée dans le contrôle des émotions, était modifiée chez des novices, avec à la clé moins de stress.

Difficile en revanche de déclencher l'effet placebo sur commande. Un patient aura beau croire de toutes ses forces aux vertus d'une pilule de sucre, il n'est pas certain que celle-ci fasse effet. Ce que l'on sait, c'est que notre inégalité face à l'effet placebo se lit dans nos gènes. Deux études, en Suède et aux Etats-Unis, ont ainsi montré que seuls les sujets porteurs de caractéristiques génétiques spécifiques réagissaient à un traitement anxiolytique ou antidépresseur factice.

Faut-il craindre des effets secondaires ?
Si " les effets néfastes éventuels de la méditation ne sont guère documentés " , selon Christophe André, psychiatre à Sainte-Anne, se retrouver face à soi-même peut toutefois s'avérer difficile. " Méditer expose à des pensées, émotions ou sensations douloureuses que l'on évite habituellement, de façon consciente ou non. "

Le neurofeedback peut, lui, entraîner de réels effets néfastes si la région du cerveau dont on souhaite modifier l'activité est mal ciblée ou mal stimulée. Pour minimiser ce risque, aux Etats-Unis, où ce procédé est très réglementé, des analyses précèdent les séances. Chez les enfants atteints de trouble du déficit de l'attention avec hyper activité, on compare l'activité du cerveau avec les enregistrements d'enfants "normaux", afin de déceler les anomalies.

Mais ce n'est pas toujours simple : même si ce trouble est le plus souvent lié à un excès d'ondes lentes dans le lobe frontal, il existe aussi des schémas opposés, avec des ondes rapides. " Donc, si l'on se trompe de schéma, on va faire du mal au patient ! " , prévient Marco Congedo, chercheur au Gipsa-Lab de Grenoble.

Quant à l'effet placebo, aucun problème tant que la motivation est au beau fixe. Mais le phénomène contraire, l'effet nocebo, existe - et il est aussi puissant. Le neuroscientifique Fabrizio Benedetti a montré que si l'on persuade des patients parkinsoniens que leur stimulateur cérébral est à l'arrêt (alors qu'il fonctionne), leurs performances motrices se détériorent !

Quel est le rôle de l'inconscient ?
Cela dépend. Parfois, le contrôle de l'esprit est pleinement conscient. Pour preuve, l'implication du cortex préfrontal, région liée à l'anticipation et au contrôle cognitif, dont l'activité est indispensable pour que s'élabore l'effet placebo. A l'inverse, chez des malades Alzheimer, dont le cortex préfrontal dégénère, le placebo a beaucoup moins d'effet. Impossible que s'élabore chez eux l'attente d'un bénéfice thérapeutique futur.

Mais ce pouvoir de l'esprit n'est pas toujours conscient. En 2003, Fabrizio Benedetti le prouvait par une expérience. Après avoir administré à des sujets un composé modulant la sécrétion d'hormones - stimulant la sécrétion d'hormones de croissance et réduisant celle de cortisol -, il le remplaça par un placebo… qui produisit les mêmes variations hormonales, quand bien même le chercheur tentait de persuader les cobayes que les effets inverses étaient attendus ! Si la suggestion verbale peut être efficace dans le contrôle de la douleur (une fonction physiologique consciente), seul un conditionnement inconscient agirait sur des fonctions également inconscientes, comme la sécrétion d'hormones… ou le système immunitaire. Ainsi, une étude américaine montrait en 2003 que les méditants produisent plus d'anticorps que des sujets lambda après une vaccination. Difficile de croire qu'ils aient contrôlé consciemment leur système immunitaire… Il est probable que la méditation ait agi indirectement, en diminuant leur stress, dont les méfaits sur l'immunité sont connus.

La Sécurité sociale rembourse-t-elle cette médecine ?
Oui pour la méditation, lorsqu'elle rentre dans le cadre d'une prise en charge hospitalière ou psychiatrique - comme pour toutes les psychothérapies. Oui également pour l'effet placebo, à hauteur du remboursement prévu pour le traitement suivi… car, dès lors qu'un médicament est remboursé, l'effet placebo associé l'est nécessairement ! Plus sérieusement, la Sécurité sociale ne rembourse pas une substance inerte, même lorsque ses effets sur la santé sont démontrés. Quant aux séances de neurofeedback proposées par de rares psychiatres en France, elles ne sont pas remboursées, aucune réglementation n'encadrant, pour l'heure, cette pratique.
L'hypnose permet-elle a aussi de soigner le corps ?
siècle, en France, le neurologue Jean-Martin Charcot introduisait l'hypnose à l'hôpital pour traiter l'hystérie. Si le côté spectaculaire des séances a depuis disparu, l'essentiel demeure : le thérapeute plonge le patient, par les gestes et par des paroles apaisantes, dans un état de "transe hypnotique".

Détendu, réceptif, celui-ci entend alors le praticien lui suggérer les changements à opérer dans son comportement pour guérir, avant de sortir de son état hypnotique sur injonction du thérapeute. De telles séances d'hypnose médicale sont couramment utilisées contre certaines phobies ou addictions.

Elles ont lieu dans un cadre instauré il y a treize ans, avec le premier diplôme reconnaissant la pratique.
Il existe désormais huit diplômes universitaires d'hypnose, qui valident une formation spécifique pour les médecins et les psychologues cliniciens (soit 250 médecins formés chaque année). Une technique largement reconnue, donc, et pour cause : de nombreuses études ont montré sa capacité à atténuer la douleur - elle est d'ailleurs de plus en plus fréquemment utilisée en accompagnement de l'anesthésie avant une opération chirurgicale -, l'épilepsie… ou l'eczéma. Si l'hypnose repose sur une modification de l'esprit du patient, cette dernière passe néanmoins, obligatoirement, par le travail de suggestion du thérapeute : ici, la force de l'esprit est donc autant celle du médecin que celle du patient.

Où aller pour bénéficier de ces pratiques ?
Pour exploiter les pouvoirs du placebo, il suffit de se rendre chez son médecin ! Car le placebo n'est pas seulement la pilule sans principe actif : ce sont aussi les paroles, les rituels de l'acte thérapeutique, les croyances… que renforce la conviction du médecin, d'autant plus si la relation avec le patient est bonne.

Pour le neurofeedback, il est difficile de conseiller de bonnes adresses en France, où la pratique n'est pas réglementée. " Ce sont les psychiatres qui utilisent l'électroencéphalo graphie pour faire du neurofeedback , observe Marco Congedo, chercheur au GipsaLab, à Grenoble. Mais suivant quelle méthode ? Font-ils des analyses au préalable ? Avec quelles bases de données ? "

Difficile de le savoir… Quant au neurofeedback par IRM fonctionnelle en temps réel, cette technologie, trop chère pour être largement utilisée à l'hôpital, est réservée à la recherche.

Méditer se révèle en revanche beaucoup plus simple. " On peut s'entraîner à la pleine conscience à peu près n' importe où, dans le bus, en marchant… " , souligne Jon Kabat-Zinn, grand importateur de la méditation dans le champ de la psychologie clinique.

A condition d'en connaître les bases. Pour faciliter cet apprentissage ou approfondir sa pratique, il est conseillé de suivre l'enseignement de professionnels. L'Association pour le développement de la mindfulness (pleine conscience) en France donne la liste de ses membres actifs sur son site internet : "www.association-mindfulness.org".

Peut-on doper les pouvoirs de l'esprit ?
On serait tenté de le croire. Après tout, on sait déjà doper le cerveau à l'aide d'excitants, voire de stimulations électriques ou magnétiques. Et de fait, des chercheurs du MIT sont parvenus, il y a quelques années, à provoquer des oscillations des ondes gamma caractéristiques de la méditation. Un succès cependant tout relatif : les "patients" étaient des rats et le "dopage" nécessitait la diffusion de lumière à la surface de leur cerveau via une fibre optique traversant leur crâne. Sachant par ailleurs que, dans le cas du neurofeedback, l'effet thérapeutique consiste d'abord à ramener l'activité cérébrale à la normale quand elle s'en éloigne… Doper les forces de l'esprit s'annonce donc, outre délicat, sans doute risqué.

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?Vous avez MAINTENANT LE POUVOIR D’AGIR SUR VOTRE CERVEAU ! ? ET IL EST IMPOSSIBLE de VOUS louper !
Les informations publiées par NEUROSCIENCES ne se substituent en aucun cas à la relation entre le patient et son médecin traitant.