Comment réagit le cerveau face au stress

  • 20 Mars 2021
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Les émotions sont plutôt favorables à la plasticité cérébrale, et nourrissent la réserve cognitive que chaque individu se construit au fil du temps. Jusqu’à ce seuil… où tout bascule. Pourquoi ? Et qui est concerné ? Explications.

Les émotions sont plutôt favorables à la plasticité cérébrale, et nourrissent la réserve cognitive que chaque individu se construit au fil du temps. Jusqu’à ce seuil… où tout bascule. Pourquoi ? Et qui est concerné ? Explications.

Le stress est un mécanisme d’adaptation naturel à un changement extérieur : « Le bon stress, souligne le neuropsychologue Francis Eustache, est une tension positive, y compris pour la mémorisation. Il favorise l’attention et la concentration, l’encodage profond des informations. » Le chef d’orchestre de cette réaction, c’est la noradrénaline, dont la libération dans l’amygdale facilite la plasticité dans les zones du cerveau pour les mémoires épisodique (l’hippocampe) et procédurale (le striatum) : « Il a été démontré, précise Roland Jaffard, neurobiologiste qui a coécrit avec lui Mémoire et émotions, que si l’on active le cerveau avec de la noradrénaline après un apprentissage, celui-ci s’en trouve amélioré.

Mais si vous dépassez les bornes, avec un éveil émotionnel trop intense, vous détruisez l’hippocampe, et perdez en plasticité des synapses. La mémoire épisodique ne peut plus fonctionner. » En somme, le mécanisme s’inverse : « Si le sujet est exposé, soit à un stimulus traumatique qui est reproduit, soit un stimulus qu’il ne sait pas gérer, il se met en réaction d’alerte, et la sécrétion de cortisol réduit les connexions entre les neurones ; le cerveau ne mémorise plus que ce qui est actuel et dégrade ce qui est passé », reprend François Vialatte, docteur en neurosciences cognitives, enseignant à l’ESCPI et formateur en gestion du stress à Paris sciences et lettres. « Ce mécanisme d’alerte dysfonctionne par exemple dans le stress post-traumatique, un trouble qui atteint les victimes d’un stress intense : attentat, agression, viol, etc. ».

Le rôle néfaste du stress chronique

 

Une dépression peut aussi apparaître car son lien avec le stress – facteur déclenchant – est désormais bien documenté. « La dépression, note la psychogérontologue Hélène Amieva, comme l’anxiété, le syndrome de stress post-traumatique, les troubles du sommeil, le stress, augmentent la vulnérabilité aux maladies de la mémoire, en particulier la maladie d’Alzheimer. » Leur point commun ? La rumination mentale, c’est-à-dire des pensées négatives systématiques. Tous les chercheurs confirment le rôle néfaste du stress chronique, de la répétition des situations qui le génèrent. « Un stress continu est un facteur négatif à long terme », résume Francis Eustache, qui souligne que notre « réserve cognitive » – terme qu’il préfère à celui de dette – se construit au moyen de l’éducation, des relations sociales, de l’activité sportive, de la nutrition : « Cette réserve, si elle ne retarde pas le vieillissement, peut en retarder les effets délétères, parmi lesquels les maladies neurodégénératives. » Il est désormais connu que les stigmates de la maladie d’Alzheimer sont présents dès 40 ans chez des sujets qui la déclareront à 75 ans ; ce qui se passe au long de la vie a une influence sur la façon dont la maladie se développe.

Nous ne sommes pas tous câblés de la même façon :

Mais qu’est-ce qui fait qu’une personne interprète de façon négative un signal, une douleur, un inconfort, un stimulus social, et se place en situation d’alerte ? « Nous ne sommes pas tous câblés de la même façon, répond François Vialatte, cela résulte à la fois d’un tempérament et d’une histoire de vie. » Il nomme « variable d’acceptation » notre capacité à percevoir le stress et à ne pas réagir immédiatement, autrement dit la composante endogène de ce mécanisme : « Les individus qui ont une bonne conscience de ce qui se passe dans leur corps gèrent mieux leur stress », conclut le chercheur. Quel est l’enjeu ? Calmer ses réponses émotionnelles pour ne pas faire des choses que l’on va regretter. Cependant, acceptation ne vaut pas résignation, précise François Vialatte : il s’agit de se laisser le temps d’agir, donc, plutôt que réagir.

Des oméga 3 contre le stress :

Comme les êtres humains, les souris ne sont pas égales face au stress. Des chercheurs de l’Inserm et de l’Inra, qui avaient montré en 2011 qu’une trop faible consommation d’oméga 3 chez le rongeur augmentait son stress, ont identifié il y a deux ans chez les rongeurs l’une des causes de cette injustice : les plus résilients serait dotés d’une meilleure plasticité neuronale du noyau accumbens, une zone du cerveau impliquée dans la gestion des émotions et du stress, où sont produits les endocannabinoïdes. Or les oméga 3, ces molécules que l’on trouve notamment dans les poissons gras et les oléagineux (amandes, noix, etc.) stimulent la production de ces substances. Et il est également établi que les concentrations sanguines d’endocannabinoïdes diminuent chez les personnes dépressives.

(Source :CM)